Evaluer l’éducation à la citoyenneté, entre recherche et enseignement
Discussion
Intervention
Manon Berriche, doctorante au médialab de Sciences po
Géraldine Bozec, Maîtresse de conférences à l’Université de Nice Côte d’Azur
Organisées par l’équipe pilote citoyenneté numérique et diversité du projet Ampiric, cette journée propose de réfléchir aux pratiques d’apprentissage et d’évaluation de l’éducation à la citoyenneté, notamment en donnant la parole à des chercheurs ayant participé à l’enquête ICCS. Ces résultats seront mis en discussion au regard avec les travaux de chercheurs qui appréhendent l’éducation à la citoyenneté d’un point de vue critique, pour élargir ces perspectives de l’apprentissage de l’exercice civique et citoyen et de son évaluation, dans une perspective pluridisciplinaire. Enfin, ces apports de la recherche seront croisés à des tables rondes dans lesquelles des personnels scolaires, CPE ou professeur documentalistes, présenteront avec leurs élèves des initiatives locales d’apprentissage de la citoyenneté dans les établissements scolaires marseillais.
>Programme :
8h30 accueil café
9h00 : ouverture de la journée par Pascale Brandt-Pomarès, directrice de l’INSPE, Mathilde Favier, cheffe de projet du pôle pilote Ampiric, Eric Rusterholtz Conseiller technique établissements et vie scolaire du rectorat d’Aix-Marseille
9h15 : Présentation par l’équipe de la Direction de l’Evaluation, de la Prospective et de la Performance (DEPP) du Ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse des résultats de l’enquête ICCS sur l’éducation civique et l’éducation à la citoyenneté
Sébastien Lambert, Professeur d’Histoire-Géographie-EMC, Chargé d’études et d’évaluations au Bureau de la conception et du pilotage des évaluations des élèves, DEPP B2-1
Audrey Léger, Chargée d’études et d’évaluations au Bureau de la conception et du pilotage des évaluations des élèves, DEPP B2-1
Élodie Persem, Cheffe du pôle Accessibilité Innovation et Recherche au Bureau de la conception et du pilotage des évaluations des élèves, DEPP B2-1
Hugo Rogie, Chargé d’études statistiques au Bureau des études statistiques et psychométriques sur les évaluations des élèves, DEPP B2-2
L’étude ICCS (International civic and citizenship education study, organisée par l'IEA (organisation internationale indépendante pour l'évaluation scolaire), s’intéresse aux connaissances et attitudes civiques et citoyennes des élèves. Pour cela, l’enquête interroge des élèves scolarisés au grade 8 (équivalent de la classe de quatrième en France). La France participe pour la première fois à l’étude en 2022, aux côtés de 22 autres pays.
Pour sa première participation à cette étude, la France obtient des résultats en connaissances civiques et citoyennes dans la moyenne des pays participants. Les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons, avec de moindres écarts en France qu’à l’échelle internationale. Les scores sont, en moyenne, plus élevés pour les élèves de milieux plus favorisés ou disposant de plus de ressources culturelles à la maison. Cette étude révèle également que les élèves manifestent un fort engagement pour l’égalité des droits et pour l’environnement en France comme à l’international. Plus largement, ICCS s’intéresse à la manière dont les élèves de quatrième sont préparés à leur rôle de citoyens. Il s’agit de l’unique enquête d’une telle envergure internationale portant sur ce sujet.
10h15 : Table ronde, expériences plurielles d’éducation à la citoyenneté
Présentation de projets et d’initiatives d’éducation à la citoyenneté menés sur le terrain, par des conseillers principaux d’éducation et professeurs documentalistes des réseaux de formation de Marseille.
11h15 : Pause-café
11h30-12h30 : Conférence de Manon Berriche, doctorante au médialab de Sciences po, sous la direction de Dominique Cardon et de Sophie Pène
Sophie Gebeil, AMU - TELEMMe, discutante
Alors que les millions de réactions générées par les fake news sur les réseaux sociaux sont souvent interprétés comme des indicateurs d’un marché dérégulé de l’information et d’une crédulité de masse, de nombreuses quantitatives ont toutefois montré que, malgré leur viralité, les fake news occupaient une faible place dans les régimes de consommation médiatique des publics, et n’avaient pas d’effets directs et forts sur leurs croyances, attitudes et comportements. Ce décalage entre les discours publics sur les fake news et la littérature académique invite dès lors à se demander pourquoi, malgré les transformations provoquées par les plateformes numériques sur la publication et la consommation d’informations, les utilisateurs des réseaux sociaux consomment et partagent peu de fake news ? Pour répondre à cette question, deux enquêtes empiriques articulant à la fois des méthodes quantitatives et qualitatives (i.e. analyse de traces numériques, observations en ligne et entretiens semi-directifs) ont été réalisées sur Twitter et Facebook. Trois résultats
principaux ressortent. Premièrement, le partage de fake news est loin de toucher de façon égale et indifférenciée l’ensemble des utilisateurs des réseaux sociaux, mais n’est en réalité observable que pour un groupe restreint d’internautes dont la particularité n’est pas d’être moins éduqués ou moins dotés en compétences cognitives que les autres, mais davantage politisés et défiants à l’égard des institutions, ainsi que beaucoup plus actifs en ligne.
Deuxièmement, les utilisateurs des réseaux sociaux exposés à des fake news sont en mesure de déployer des formes de distance critique, de façon plus ou moins importante, selon leur intégration dans l’espace social et les contraintes énonciatives des situations dans lesquelles ils se trouvent, soit en faisant preuve de “prudence énonciative”, soit en exprimant des “points d’arrêt”. Troisièmement, les mécanismes d’auto-régulation observées au cours d’échanges conversationnels permettent rarement la participation du plus grand nombre, ou l’émergence de véritables débats animés par l’intérêt public, mais donnent plutôt lieu à des dialogues de sourds entre une minorité d’internautes particulièrement actifs en ligne qui, en accaparant ainsi la prise de parole sur les réseaux sociaux, facilitent la mise à l’agenda des opinions défendues par leur camp politique dans le débat public. Nos conclusions invitent ainsi les futures études académiques ainsi que le débat public à se décentrer de la seule question des fake news pour être également attentif à d’autres troubles informationnels comme la manipulation de l’agenda, les différentes formes de polarisation et les incivilités en ligne.
12h30 – 13h30 : Pause déjeuner
13h30 – 14h30 : Conférence de Géraldine Bozec, Maîtresse de conférences à l’Université de Nice Côte d’Azur, à propos du rapport sur l’éducation à la citoyenneté du CNESCO de 2016
14h30-15h15 : Denis Carotti, délégué académique à la vie lycéenne et Marine Gueydan, chargée de mission Laïcité et valeurs de la République au rectorat d’Aix-Marseille présenteront le travail mené avec les lycéens du conseil académique de la vie lycéenne (CAVL), pour la réalisation d’un vademecum laïcité pour et par les élèves.
15h15-15h30 : Pause
15h30 – 16h30 : Conférence de Grégoire Borst, Professeur de psychologie du Développement et de neurosciences cognitives de l’éducation et Directeur du Laboratoire de Psychologie du Développement et de l’Education de l’enfant (CNRS).
Apprendre à penser contre soi-même pour lutter contre les fakes news et les théories du complot : Les nouvelles pratiques informationnelles des adolescents sur les réseaux sociaux les exposent à des fausses informations et des théories complotistes. Alors que ces pratiques informationnelles ont été bien documentées chez les adolescents, leurs capacités à discerner les fausses informations et les théories complotistes restent encore peu étudiées. Nous présenterons un ensemble de données qui illustrent le développement de ces capacités au cours de l’adolescence, et permettent d’identifier les mécanismes qui participent au développement de ces capacités. Nous évoquerons aussi les leviers pédagogiques les plus efficaces pour leur permettre de mieux discerner les fausses informations et mieux lutter contre les théories complotistes.
Cette journée du 23 mai 2024 organisée en partenariat entre l’INSPE, le pôle pilote Ampiric et l’académie d’Aix-Marseille accueillera à l’INSPE de St Jérôme, les étudiants des master MEEF, CPE et professeurs documentalistes, mais aussi l’ensemble des CPE et professeurs documentalistes de la ville de Marseille. Elle est aussi ouverte aux chercheurs intéressés par l’éducation à la citoyenneté et à l’apprentissage du respect d’autrui.